Chers Amis et Chers Enfants Boker Tov,

Nous avons choisi de rédiger certains récits,comme celui qui va suivre,à la première personne pour mieux les vivre ...
Suivez moi et partagez autour de vous ...Ne laissons jamais,mais jamais, personne seul,livrée à son sort ...

J’ai 31 ans, marié avec 4 merveilleux enfants, D.ieu merci.
Lorsque j’avais 16 ans, j’étais réservé et sans amis. C’était la suite logique de mon enfance marquée par une grande solitude.
Je pense que seuls ceux qui ont ressenti cette solitude accompagnée d’un manque d’assurance personnelle peuvent me comprendre.
C’est comme si j’assistais à un mariage en étant sourd, muet, paralysé, et… invisible : je voyais autour de moi les jeunes gens de mon âge danser, se réjouir sans faire partie de la fête.
J’étais transparent…ce qui m’attristait profondément jusqu’à un séjour scolaire.

En fin de 3e, un séjour à la montagne venait conclure mes études au collège. Nous arrivâmes jeudi en début de soirée dans le complexe hôtelier qui devait nous accueillir durant 5 jours.
Nous nous installâmes et pour ma part la perspective de partager ma chambre avec des camarades de classe qui ne me prendraient même pas en considération me plongea dans le plus grand désarroi. Mais ce séjour était obligatoire.

L’équipe de direction et d’enseignants, nous réunit très vite dans la salle à manger pour nous communiquer une information :
-« Les enfants, ce soir vous mangerez froid, notre cuisinier a un empêchement… »
S’ensuivirent des activités et autres animations puis une bonne nuit de sommeil après un déplacement de plusieurs heures particulièrement épuisant. Vendredi midi, nouveau repas froid…

Nos accompagnateurs sont inquiets, ce soir c’est Shabbath et le cuisinier ne répond pas au téléphone, et quand il le fait vers 13h00 c’est pour annoncer que « c’est définitif, il ne viendra pas ».
Notre directeur, les enseignants se concertent et décident de nous rapatrier chez nous.
L’annonce provoque beaucoup d’émoi et de contrariétés… Certains vont jusqu’à dire que leurs parents sont absents, cette agitation indispose nos responsables…
Je lève timidement le doigt, puis d’une voix aussi timide que fébrile je lance:

-« Je pense que je peux cuisiner »

Notre directeur, étonné, répond :

-« Tu penses !? »

Je baisse le regard avant de préciser d’une voix un peu plus assurée :

-« Je suis sûr que je peux cuisiner, j’aurais besoin de 5 volontaires pour m’aider »

Je ne peux pas décrire les regards de mes camarades, ni ceux de mes enseignants, ils semblaient tous découvrir ma voix, mais ils semblaient aussi adhérer à ma proposition apte à sauver leur voyage.

A partir de là et à seulement quelques heures du Shabbath je prends le commandement.
Avec les 5 volontaires, nous investissons les cuisines pour en contrôler les réserves.
Je répartis les tâches : deux vont être chargés des légumes. J’opère à une démonstration pour qu’ils répètent mes gestes.
Deux autres sont nommés « responsables des féculents », je mets sur le feu plusieurs casseroles.
Nous avons des pommes de terre, du riz, du blé… un grand choix.
Mon équipe me scrute avec une forme d’admiration. Le dernier est invité à me suivre, nous nous préoccupons simultanément du poisson d’une part et de la viande d’autre part…
Le rythme de travail que j’imprime est élevé. Les questions et les réponses sont concises dans les deux sens… En 3 heures nos deux repas, celui du vendredi et celui du Shabbath midi sont prêts.

Petite pause qui n’en est pas une puisqu’il s’agit de dresser les tables… Là aussi, je montre à mes coéquipiers comment faire… Le résultat est jugé comme étant impressionnant, de leur propre aveu.
Puis, je décide après avoir consulté ma montre de préparer un dessert : un gâteau au chocolat noir.
Deux heures avant shabbath quasiment tout est prêt et nous avons droit à une courte visite de notre directeur. L’équipe enseignante est définitivement rassurée.

Je décide pour le 3e repas de shabbath de programmer un buffet de fromages que nous découperons de diverses façons, en y associant des légumes frais, le tout dans une décoration colorée harmonieuse.
Je complimente mon équipe, nous nous organisons pour le service, avant de vite aller nous préparer pour accueillir shabbath.
Lorsque nous nous retrouvons dans la salle à manger plus tard, et qu’enseignants et élèves découvrent notre décoration, dégustent nos plats, je recueille en quelques heures plus de compliments que durant toute ma vie.
Moi qu’on ignorait superbement, je deviens le centre d’intérêt de toute mon école.
Lorsque le lendemain, nous entamons le dernier repas shabbatique, ce sont des applaudissements qui me saluent.
Notre directeur demande le silence puis m’invite près de lui :
-« Je voudrais, au nom de tous, t’exprimer toute notre gratitude… mais pas seulement. Peux-tu nous dire ton secret, où as-tu appris à faire tout cela ? »
Je suis confus, tous les regards braqués sur moi laissent entendre clairement que tout le monde espère une réponse…
Je prends la parole :
-« Vous avez dû le noter, j’ai toujours été un peu à l’écart. Il y a de cela 3 ans maman est tombée malade, mon père devait la veiller. Et moi, j’avais en charge mes trois jeunes frères. Au début, nous ne mangions que du pain et du fromage, mais un jour ma tante est venue nous cuisiner, et peu à peu elle m’apprit quelques rudiments de la cuisine. Le reste je l’ai appris tout seul et quand ma mère rentrait après ses soins toujours éprouvants, elle m’encourageait. Ma mère est morte… Je me suis promis de toujours veiller à ce que ma famille puisse manger correctement ».

Je levai les yeux pour voir des larmes dans ceux de mes enseignants, des élèves…
Il me semblait bien qu’ils culpabilisaient tous de ne s’être jamais intéressé à moi.

C’est une leçon pour moi aujourd’hui encore, ne jamais laisser personne à l’écart… s’intéresser aux autres. On peut soutenir les gens dans leurs peines, dans leur vie…

Courage,Chabbat Chalom et de bonnes nouvelles.
GZ

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